La vitamine B12 : indispensable ? Indispensable !

La vitamine B12, également appelée la cobalamine, est l’objet de nombreux débats sur Internet. Pomme de discorde entre omnivores et végétariens/végétaliens mais aussi entre les végétaliens-mêmes. Malgré l’effort des associations de mettre tout au clair en promouvant la diffusion d’informations correctes, les mythes concernant cette vitamine sont encore nombreux à circuler dans la communauté veggie. Alors, faisons le point : que sait-on exactement de la B12 aujourd’hui ?

Pourquoi doit-on consommer la B12 ?

La vitamine B12 joue un rôle indispensable dans l’organisme. Elle est essentielle à la croissance, à la division cellulaire, au fonctionnement optimal des cellules et au métabolisme des glucides et lipides.

L’absorption et l’activation de la cobalamine requiert de l’acide chlorhydrique et une protéine sécrétée par l’estomac – le facteur intrinsèque – pour ensuite être utilisée ou stockée dans le foie, le pancréas, le cœur et le cerveau. Elle sera éliminée par la bile (à l’opposé des autres vitamines du groupe B, hydrosolubles donc éliminées dans les urines et difficilement stockables).

Chez l’adulte, la capacité de stockage de cette vitamine étant assez importante, la carence se développe dans les 1 à 5 ans d’apports insuffisants. Signes alarmants, vous aurez des symptômes de fatigue (avec faiblesse et essoufflement), des nausées accompagnées d’une perte d’appétit et de poids ainsi que des problèmes intestinaux. Les nourrissons développent des symptômes plus rapidement que les adultes, le manque de vitamine pouvant conduire au coma et entraîner la mort.

Par son rôle dans la synthèse de l’ADN, l’ARN, les protéines et la myéline – composant le cerveau – la carence sévère en cobalamine induit une dégradation du système nerveux. Cela induit des symptômes tels que des fourmillements et engourdissements des membres, une difficulté à marcher, la mémoire défaillante, la confusion, les hallucinations, les changements de personnalité et d’humeur. Et en cas d’exposition prolongée à la carence, cette dégradation est irréversible !

La carence en cette vitamine provoque également une anémie dite «pernicieuse». Avant la découverte de la B12 et de son importance dans la synthèse de cellules sanguines, cette maladie suscitait l’incompréhension des médecins : l’anémie de ce type ne pouvant être guérie par des suppléments en fer.

Une déficience, c’est-à-dire un manque plus léger en cette vitamine, est également néfaste en augmentant le risque de maladies cardiovasculaire – effet lié à un taux trop élevé en homocystéine (un acide aminé) dans le sang.

Les femmes enceintes ont davantage de risques d’être victimes d’une carence en B12. Cette carence peut engendrer des complications de grossesse comme de l’hypertension artérielle (pré-éclampsie) et le spina-bifida – malformation du tube neural du fœtus. Attention, les symptômes peuvent être masqués par une prise importante d’acide folique (B9) : à superviser donc par un médecin.

Comme décrits plus haut, les symptômes d’une carence peuvent être une fatigue générale, les fourmillements, les engourdissements, la vision floue, les nausées… Ils sont généralement trop vagues pour orienter le diagnostic : mieux vaut donc prévenir que guérir ! C’est pourquoi, idéalement, nous devrions faire une prise de sang annuelle afin de suivre son statut en B12 et vérifier que les apports (malgré la supplémentation) sont adéquats à nos besoins.

Attention cependant aux résultats pouvant être faussés par une consommation riche en algues, dont la B12 (non assimilée par le corps) est comptabilisée avec la «vraie» B12 lors de l’analyse. Il est donc intéressant d’évaluer parallèlement le taux d’homocystéine, qui devrait être inférieur à 10 micromol/L, ou par analyse de l’acide méthylmalonique, qui devrait être inférieur à 370 nanomol/L de sang. Si les taux sont supérieurs, une carence en B12 sera avérée.

D’accord, mais j’en ai besoin de combien ?

Apports satisfaisants en microgrammes (µg) par jour (Sources : ANSES)

 

Groupes de population

µg/j

Nourrissons de moins de 6 mois

0,4

Nourrissons de 6 mois et plus

1,5

Enfants de 1 à 3 ans

1,5

Enfants de 4 à 10 ans

1,5

Adolescents de 11 à 17 ans

2,5

Hommes et femmes de 18 ans et plus

4

Femmes enceintes

4,5

Femmes allaitantes

5

 

Situations particulières :

Les personnes âgées ont plus de risque de mal absorber la vitamine B12 suite à une acidité gastrique réduite. Les suppléments sont cependant facilement absorbés, malgré cette diminution de l’acidité.

Les nourrissons puiseront leur B12 dans le lait maternel (la maman doit donc s’assurer d’avoir une teneur optimale en B12 pour leurs besoins respectifs) ou dans le lait maternisé. Lorsque le lait ne sera plus l’aliment principal dans l’alimentation de bébé, une supplémentation devra être instaurée.

Des problèmes de santé impliquant le facteur intrinsèque, qui permet l’absorption de la vitamine, ou des maladies diminuant l’acidité de l’estomac doivent être pris en charge par un médecin : la supplémentation par voie orale n’aura pas grand effet.

Où puis-je trouver la B12 ?

Chez le végétarien, les sources alimentaires sont les produits laitiers, le lait, le fromage et les œufs.

Teneur en B12 des aliments d’origine animale, en microgrammes (Table de Composition Nubel, 5e édition)

Aliment

µgB12/100g aliment

Œuf

1,6

Fromage à pâte dure (moyenne)

1,4

Yaourt maigre

0,4

Fromage blanc entier

0,3

Lait 1/2 écrémé

0,3

Les sources végétales de B12 sont plus rares. Ce sont les produits enrichis en B12 (sous forme de cyanocobalamine surtout – qui est une vitamine de synthèse) tels que les céréales petit-déjeuner, les biscuits et les alternatives végétales au lait et au yaourt.

Les algues sont actuellement un sujet à controverse mais les études récentes montrent que la B12 contenue dans les algues (y compris dans la spiruline et la chlorelle) n’est que partiellement absorbée par l’organisme humain. De plus, l’absorption est différente selon chaque individu. Quelques études montrent une corrélation entre l’augmentation du taux de B12 et la supplémentation en chlorelle. Comme les algues ne peuvent être consommées en grande quantité ni assurer un bon apport en cobalamine chez chaque individu, nous prendrons donc précaution de ne pas compter les algues comme source fiable en B12. Les produits fermentés, comme le tempeh ou le miso, contiennent également de la B12 non absorbée par l’organisme.

Les humains ne sont pas capables de métaboliser la vitamine B12 produite par leur propre flore intestinale, le site de production étant trop en amont du site d’absorption (contrairement aux ruminants : la nature n’est pas toujours bien faite !)

Alors… Devrais-je me complémenter ?

Chez le végétarien, suite à la consommation régulière de produits d’origine animale, la supplémentation ne sera pas nécessaire. Attention cependant chez les consommateurs occasionnels de ces produits : manger un yaourt par jour en vous croyant ainsi dispensé de la supplémentation est un mauvais calcul qui pourrait coûter cher à votre santé. En cas de doute, tournez-vous vers un professionnel de santé afin d’estimer votre apport en B12 alimentaire ou supplémentez-vous par précaution.

Les végétaliens sont, quant à eux, amenés à une supplémentation quasi systématique.

Pas d’inquiétude, La B12 des compléments alimentaires certifiés vegan provient du métabolisme des micro-organismes !

Selon les conseils de Vegan Health, nous vous encourageons donc vivement à suivre au moins l’une de ces recommandations :

– Manger 2 à 3 fois par jour les produits enrichis afin d’obtenir 3 µg de B12. Cependant, cette recommandation est difficile à atteindre vu le manque d’aliments disponibles sur le marché. De plus, elle incite à consommer quotidiennement des aliments industriels et pas forcément de meilleure qualité nutritionnelle. Il faut également se référer à l’étiquetage de la denrée pour connaître la valeur en exacte en B12.

– Prendre un supplément quotidien de 10 µg.

– Prendre un supplément hebdomadaire de 2000 µg (plus la prise est espacée, plus la dose doit être importante).

Le surdosage en B12 est rare. Il est toutefois conseillé de ne pas excéder 5000 µg/semaine, surtout chez les personnes à haut risque de maladie cardiovasculaire. Le complément est à prendre après un repas, en le mâchant bien. Si vous prenez de la spiruline, faites attention à ne pas ingérer les deux compléments au cours d’un même repas, la spiruline bloquant l’absorption de la B12 en faisant croire à vos cellules qu’elles ont déjà reçu leur dose !

Certains médicaments comme les réducteurs d’acidité gastrique (type Oméprazole), les hypoglycémiants (Metformine) ainsi que la colchicine (contre la goutte), la cholestyramine (anticholestérol : Questran) et néomycine (antibiotiques) peuvent réduire l’absorption de la cobalamine. Parlez-en à votre médecin si vous prenez un de ces médicaments ou si vous êtes inquiet à propos d’un de vos traitements.

Les compléments alimentaires sont vendus sous différentes formes (capsules, sprays, comprimés, poudres, sirops, ampoules, injections, – et même du dentifrice) et sous différents dosages. À chacun d’adapter la forme galénique selon sa préférence et son mode de vie : en théorie, la quantité absorbée dépendra peu de la forme sous laquelle on prend la vitamine.

Par exemple, la Veg-1 de la Vegan Society contient 10 µg de cobalamine. Ainsi, il est conseillé de croquer un comprimé par jour. Si vous avez tendance à oublier votre indispensable vitamine, mieux vaut choisir des dosages plus élevés, à consommer de façon hebdomadaire (comme chez Solgar).

La molécule peut être présentée sous 4 formes différentes : méthyl-, hydroxy-, adénosyl- et cyanocobalamine. Les méthyl- et adénosylcobalamine sont directement absorbées par l’organisme, tandis que les deux autres ont besoin de passer par une transformation préalable avant de pouvoir être utilisées par le corps. La cyanocobalamine devrait être évitée par les gros fumeurs, qui ont déjà une surcharge en cyanure (élément toxique). La forme hydroxylée, elle, présente une bonne capacité pour être stockée dans l’organisme et sert en plus de détoxifiant (en éliminant le cyanure, par exemple).

Les gélules de B12 sont généralement sans aucun autre additif, ce qui est différent pour les comprimés auxquels on ajoute souvent du sucre, des arômes, des colorants. Les formes en spray/dentifrice/… sont relativement bien absorbées par la muqueuse de la bouche. Elles seraient pratiques chez les personnes âgées ayant des troubles de déglutition.

Le dentifrice peut offrir une source supplémentaire en B12 mais ne peut se substituer à la complémentation, le dosage de la vitamine étant trop faible.

Les compléments alimentaires de la B12 peuvent être trouvées dans les magasins spécialisés dans le végétalisme et également sur Internet. Attention cependant à bien vérifier le dosage et la forme de la vitamine présentée, et la choisir certifiée Vegan (logos reconnus).

Doit-on les conserver de manière spéciale ? Chaque forme de vitamine B12 est vulnérable à différents facteurs comme la lumière, l’humidité ou la chaleur. Il est donc préférable de stocker le supplément à l’abri, dans un placard au frais par exemple.

En résumé :

– La B12 est indispensable aux végétaliens et aux végétariens consommant peu de produits venant de l’animal.

– Aucun aliment végétal ne permet d’avoir un apport en B12 suffisant.

– Une prise de sang annuelle mesurant la B12 et l’homocystéine permettra de vérifier une éventuelle carence.

– Choisir le complément alimentaire qui vous correspond en veillant à ce qu’il comporte un logo vegan reconnu.

– Les compléments de B12 sont à conserver dans un placard à l’abri de la lumière et de la chaleur.

Sources :

1 J Med Food. 2015 Dec;18(12):1357-62. doi: 10.1089/jmf.2015.0056. Epub 2015 Oct 20.

NutritionalSupplementationwithChlorellapyrenoidosaLowersSerumMethylmalonic Acid in Vegans and Vegetarianswith a Suspected Vitamin B12 Deficiency.

2 http://www.veganhealth.org/files/french_what_every_vegan_should_know.pdf

3 http://www.dietitians.ca/Downloads/Factsheets/Food-Sources-of-Vitamin-B12-FRE.aspx

4 Koyama K, Yoshida A, Takeda A, Morozumi K, Fujinami T, Tanaka N. Abnormal cyanide metabolism in uraemic patients. Nephrol Dial Transplant. 1997 Aug;12(8):1622-8

5 Cobalamin metabolism and its clinical aspects, Linnell JC, Matthews – 198